C’est l’histoire contemporaine de la famille paysanne Solé. Elle vit en Catalogne mais quiconque est paysan·ne ou s’intéresse à la vie paysanne en France et en Europe (et ailleurs) s’y retrouvera. Car le film est cette vie-là, continuité historique dysharmonieuse, passée-poussée par la monoculture (ici, celle des pêchers) et son marché global (qui ne rémunère pas les producteurs et productrices), confrontée aujourd’hui aux nouvelles offres, ici la production d’énergie solaire en lieu et place de leur(s) culture(s). Avec celui qui a les terres en mains – le propriétaire des terres – et celles et ceux qui ne les ont pas. On passe aussi des fêtes traditionnelles à la techno, du vin en excès au cannabis si peu clandestin, nos petites histoires ballottées par la grande.
La famille se déchire, entre ceux qui céderont à la proposition de passer dans le camp des vainqueurs, en changeant de champ pour passer dans celui où l’installe les panneaux photovoltaïques – où “on travaille moins et ça rapporte plus” – et ceux qui resteront pour l’honneur jusqu’au bout, sachant que le bout vient, et même qu’il est déjà là. On parle de bouleversement, mais aussi de dignité.
Carla Simón, la réalisatrice est originaire d’Alcarràs, le village qui donne son nom au titre du film en Espagne, où ses oncles sont arboriculteurs. Tourné avec des actrices et des acteurs non profesionnels, ce film, volontairement politique et sociologiquement pertinent, est aussi remarquable sur le plan cinématographique : en témoigne l’Ours d’Or qu’il a remporté au festival de Berlin en 2022 et sa sélection comme candidat de l’Espagne pour les prochains Oscars.
Critique de Benoît Ducasse, parue dans le numéro du mois de janvier de Campagnes solidaires, le mensuel de la Confédération paysanne engagé avec les paysans et les acteurs du mouvement social dans l’émergence d’autres mondes possibles.
Dates et horaires au cinéma Marcel Pagnol de Malakoff :
durée : 2h